Formation en entreprise et apprentissage en contexte entrepreneurial
La formation en entreprise représente un volet important de la formation continue, mais sa diversité empêche toute description exhaustive. Cet article propose donc pour commencer de montrer comment ce domaine hétérogène, mais dans le même temps important pour la formation continue, prend forme en Suisse. Il cherchera par ailleurs à savoir comment on peut l’appréhender de façon à le rattacher à sa conception pratique et à la recherche sur le sujet. Nous distinguerons à cette fin deux perspectives, à savoir la perspective organisationnelle de l’entreprise concernant la formation professionnelle continue en entreprise, et la perspective individuelle du personnel concernant l’apprentissage réalisé en contexte entrepreneurial. En réunissant ces deux perspectives, nous proposerons une base pertinente pour appréhender la formation professionnelle continue en entreprise.
1 Introduction
Les entreprises jouent un rôle majeur dans la formation professionnalisante. Cela est d’autant plus vrai pour la formation continue, puisque les entreprises fournissent la base de l’apprentissage basé sur l’expérience dans le processus itératif du développement des compétences (Kraus, 2022). En proposant directement des formations continues ou en permettant à leur personnel de prendre part à diverses offres, les entreprises jouent un rôle déterminant dans la formation continue de la population active (Käpplinger, 2018). La majeure partie des formations réalisées directement sur le terrain, qui jouent également un rôle central dans le développement des compétences, a du reste lieu en entreprise (Billett, 2021; Fuller et Unwin, 2013; Marsick et Watkins, 1990). Le champ couvert par la formation professionnelle continue en entreprise est par conséquent aussi protéiforme que l’est le paysage entrepreneurial, c’est pourquoi la recherche qualifie parfois les entreprises, qui hébergent plusieurs lieux de formation, de «méta-lieux de formation» (Dehnbostel, 2023). Avec leurs départements de gestion des formations et des ressources humaines, les entreprises assument en outre d’autres fonctions liées à la formation en entreprise.
Face à une telle hétérogénéité, cet article cherche à savoir comment structurer ce domaine hétérogène, et dans le même temps important pour la formation continue. Il propose pour cela d’adopter une approche distinguant puis réunissant deux perspectives puisque, d’une part, le point de vue du personnel apprenant joue un rôle déterminant dans la formation en entreprise et, d’autre part, le domaine de la formation en entreprise se construit à travers le rapport qu’il entretient avec l’organisation des entreprises. Nous discuterons ensuite par conséquent de la façon dont on peut appréhender la formation professionnelle continue en entreprise en tenant compte de ces deux perspectives.
Pour déployer cette approche, l’article présentera dans un premier temps l’objet de la réflexion: nous esquisserons d’abord à cette fin l’écosystème des entreprises et de la formation professionnelle continue en entreprise en Suisse (2), puis nous présenterons diverses formes prises par cette dernière (3). Dans un deuxième temps, les deux perspectives concernant cet objet seront au cœur de la réflexion, à savoir d’une part la perspective organisationnelle de l’entreprise (4), et d’autre part la perspective individuelle du personnel (5). Le résumé final réunira ces deux perspectives, puis discutera des idées qu’est susceptible d’apporter cette façon d’appréhender la formation en entreprise et l’apprentissage en contexte entrepreneurial; puis il se demandera dans quelle mesure cette approche peut aider la conception de ce domaine ainsi que la recherche sur la formation professionnelle continue en entreprise.
2 Entreprises et formation professionnelle continue en entreprise en Suisse
Jusqu’en 2015, l’Office fédéral de la statistique a réalisé une enquête sur la formation initiale et continue en entreprise, en s’appuyant sur un échantillon de 8 000 entreprises (Office fédéral de la statistique, 2018). Après avoir mis fin à cette enquête spéciale, il a fourni des évaluations sur les formations continues soutenues par les employeurs en s’appuyant sur les données du microrecensement (consultation menée auprès de la population résidente). Ainsi, on ne dispose malheureusement plus de données sur la formation professionnelle continue en entreprise partant du point de vue des entreprises. Les seules informations dont on dispose, indirectes, proviennent des renseignements fournis par les personnes participant aux formations continues concernant le soutien accordé par les employeurs. Nous utiliserons les données disponibles pour donner ci-après un bref aperçu des entreprises présentes en Suisse ainsi que de leurs activités de formation. Pour ses statistiques, l’Office fédéral de la statistique utilise le terme «entreprises», qu’il définit comme des organisations opérant de manière autonome, aux niveaux opérationnel et stratégique, et cotisant à l’assurance-vieillesse et survivants dans la mesure où elles emploient des individus afin de leur faire fournir des services (Office fédéral de la statistique, n. d.).
Le paysage entrepreneurial et les activités de formation des entreprises se présentent tous deux comme un domaine diversifié et hautement structuré. Des facteurs tels que la taille, le secteur ou la région jouent un rôle déterminant, tant pour les activités économiques des entreprises que pour leur engagement dans la formation continue.
Parmi les près de 640 000 entreprises que compte la Suisse, 8% environ opèrent dans le secteur primaire (agriculture et sylviculture), quasiment 15% dans le secteur secondaire (industrie manufacturière, transports, alimentation en eau et en énergie, secteur du bâtiment) et une écrasante majorité, à savoir presque 80%, dans le secteur tertiaire réunissant les services (p. ex. le commerce, la restauration, la communication, les services de santé et les services sociaux) (Office fédéral de la statistique, 2024a). Les entreprises employant moins de 250 personnes sont considérées comme de petites et moyennes entreprises (PME). Dans le tissu économique suisse, leur part s’élève à 99% de l’ensemble des entreprises (Office fédéral de la statistique, 2024b). Un nombre relativement élevé de grandes entreprises multinationales ont dans le même temps leur siège en Suisse (Département fédéral des affaires étrangères, 2025). Le paysage économique suisse présente donc une double structure avec, d’une part, des entreprises (familiales) de taille moyenne et, d’autre part, de grands groupes actifs à l’échelle internationale. Si les grandes entreprises ne représentent que 1% du nombre d’entreprises présentes dans le pays, elles emploient un tiers des personnes (Office fédéral de la statistique, 2024c).
Ces différences entre les entreprises ne sont pas sans importance pour la formation professionnelle continue en entreprise, puisque celle-ci dépend justement des conditions générales de chacune d’elles, mais aussi, outre la culture d’entreprise, de la taille et du secteur d’activité (Gerhards et Krause, 2021). En témoignent notamment les données du microrecensement de 2021, qui révèlent que seul un tiers environ du personnel des entreprises employant moins de dix personnes a participé à une formation continue financée par l’employeur, un chiffre qui monte à près de deux tiers dans les grandes entreprises (Office fédéral de la statistique, 2024d). Ces données sur les activités de formation continue des entreprises, recueillies ici du point de vue du personnel, sont similaires à celles portant sur les entreprises actives dans la formation continue recueillies lors de la dernière enquête menée auprès des entreprises en 2015. En effet, 100 % des grandes entreprises y rapportaient proposer des activités de formation continue, contre un peu moins de 90% des entreprises employant dix à quarante-neuf personnes. Pour les entreprises de moins de dix personnes, aucune donnée n’est disponible (Stutz et Erlach, 2018, p. 7).
L’importance de la taille de l’entreprise est d’autant plus manifeste lorsque l’on tient compte uniquement des cours organisés par les entreprises actives dans la formation continue: près de 100% des grandes entreprises indiquent également proposer des cours organisés par elles-mêmes en interne ou externe, alors que seule la moitié environ des entreprises de dix à quarante-neuf personnes propose des cours organisés en interne, et qu’un peu plus de deux tiers seulement prennent en charge la participation du personnel aux cours organisés en externe. Pour les grandes entreprises, les cours organisés en externe sont pour l’essentiel des cours de préparation à des diplômes de formation professionnelle supérieure soutenus par l’entreprise. Les petites entreprises, pour leur part, sont proportionnellement plus nombreuses à soutenir également des cours débouchant sur d’autres diplômes (Stutz et Erlach, 2018, p. 9).
Des différences notables sont à relever également entre les secteurs. D’après l’enquête menée auprès des entreprises, le spectre s’étend de près de 100% d’entreprises actives dans la formation continue pour le domaine des services de santé et des services sociaux, jusqu’à 66% pour le domaine de l’hôtellerie et de la restauration. Il importe de rappeler, sur ce point, que ces statistiques incluent principalement les formations continues organisées sous forme de cours, et qu’une grande partie des mesures déployées pour développer les ressources humaines n’a donc pas été prise en compte. L’omission vaut également pour l’apprentissage réalisé durant le processus de travail, souvent négligé par les entreprises interrogées (Stutz et Erlach, 2018, p. 10).
Outre les macro-données relatives aux activités de formation continue dont nous venons de fournir un aperçu, les études menées sur les entreprises attestent de la diversité des activités de formation continue proposées, et montrent de manière plus approfondie, par l’intermédiaire d’études de cas, comment les entreprises organisent ces formations continues. Ainsi, la Fédération suisse pour la formation continue fournit quelques résultats d’une enquête menée récemment sur les entreprises employant plus de cinquante personnes. Ces résultats montrent par exemple que ces entreprises considèrent les formations continues comme importantes stratégiquement, et qu’elles constatent une forte motivation pour la formation continue chez leur personnel, dont l’expérience de formation est considérée comme plus importante que les diplômes formels (M. Müller et al., 2024, p. 3 s.).
Nous pouvons retenir de ces données que le paysage entrepreneurial suisse est certes fortement dominé par le secteur des services, mais que les activités de formation continue proposées par les entreprises présentent de fortes variations au sein de ce dernier, selon le domaine d’activité. Si les entreprises sont toutes actives dans le domaine de la formation continue, qu’elles soient de petite, moyenne ou grande taille, nous pouvons partir du principe que les activités de formation continue sont généralement systématiques au sein des grandes entreprises. Du point de vue du personnel, cela ne signifie toutefois pas que ces activités de formation continue profitent de la même manière à toutes et à tous.
3 Formation professionnelle continue en entreprise: formes et perspectives
Les offres organisées proposées sous forme de cours, conférences ou ateliers constituent un autre élément important de la formation professionnelle continue en entreprise, comme de manière générale pour la formation continue. Les entreprises peuvent proposer ces offres de formation elles-mêmes ou permettre à leur personnel de participer à des programmes proposés par des prestataires externes. Comme nous l’avons exposé dans la première partie, ces activités diffèrent selon la taille de l’entreprise. Cela s’explique également par les différentes possibilités permettant de créer des structures entrepreneuriales différenciées. Alors que, dans les petites et moyennes entreprises, ce sont généralement des personnes disposant de connaissances généralistes qui s’occupent également de la formation continue, comme les cheffes et chefs d’entreprise, ce sont généralement plutôt des spécialistes disposant d’une formation spécifique qui remplissent cette mission au sein des grandes entreprises. Le fait qu’une entreprise ouvre des départements ou des unités organisationnelles entièrement dédiés à la gestion de la formation dans l’entreprise ou à la formation professionnelle continue en entreprise et recoure à un personnel spécialisé disposant de compétences en formation continue dépend donc également de la taille de l’entreprise. Les compétences en formation continue englobent à la fois la mise en œuvre pédagogique des offres proposées dans l’interaction avec les participantes et participants, et les activités liées à la planification, avec la mise à disposition et la mise en œuvre organisationnelle des offres. Alors que, d’un point de vue organisationnel, il s’agit de mettre à disposition ces offres, c’est la participation qui prime sur le plan personnel, laquelle peut généralement ensuite être concrétisée en la présence d’offres adaptées et de conditions-cadres favorables (Boeren, 2017).
Il existe, outre les formes classiques mentionnées, d’autres offres qui gagnent en importance dans la formation professionnelle continue en entreprise, comme notamment le coaching, les programmes de formation en ligne, les simulations ou les lieux d’apprentissage virtuels. Une plus grande attention est portée à l’apprentissage réalisé durant le processus de travail (Dehnbostel, 2024). La recherche anglophone, en particulier, connaît une longue tradition d’étude de ce que l’on appelle le Workplace Learning, qui constitue un élément à part entière de la formation en entreprise (M. Malloch et al., 2022). Le terme désigne les processus d’apprentissage en entreprise qui s’effectuent pour l’essentiel directement en exerçant une activité professionnelle, que cet apprentissage ait lieu sous une forme informelle ou de façon implicite (Marsick et Watkins, 1990). Cette forme d’apprentissage porte tout autant sur les contenus spécialisés et transversaux dépassant le cadre de l’activité professionnelle que sur le développement de l’identité personnelle (Fuller et Unwin, 2017); l’apprentissage s’effectue en effet sur deux niveaux, en s’appuyant sur le rapport existant entre l’individu, ses interactions avec les autres et l’exécution de tâches spécialisées (Illeris, 2011). Côté entreprises, les conditions requises pour l’apprentissage réalisé durant le processus de travail peuvent s’organiser de façon expansive ou restrictive (Fuller et Unwin, 2003). Les deux perspectives se relient ainsi également en ce qui concerne la forme prise par le Workplace Learning. D’un côté, le Workplace Learning se caractérise justement par son absence de forme organisée et par le fait que les besoins d’apprentissage découlent de l’activité exercée, la question immédiate étant de savoir si les individus surmonteront ou non les défis et problèmes en apprenant. D’un autre côté, les occasions de faire du Workplace Learning ne sont pas uniquement fortuites. On peut les encourager de manière ciblée en adaptant l’aménagement des postes, les activités et les processus de travail. Le fait d’apprendre, considéré comme un aspect à part entière du travail ainsi que de la résolution des problèmes et défis rencontrés durant le processus de travail, ne dépend pas seulement de l’individu, mais suppose que l’entreprise permette, estime et reconnaisse ces formes d’apprentissage.
Dans une perspective de formation, une exigence plus grande se pose par ailleurs aussi pour la formation professionnelle continue en entreprise. Celle-ci serait certes «toujours également une qualification, dans le sens où elle permet un développement fonctionnel des exigences liées au lieu de travail et des formations continues» (Allespach et Buske, 2025, p. 149); mais, dans le même temps, «une orientation uniquement sur ces aspects et sur une logique purement économique de la valorisation serait problématique» (ibid.), car une telle orientation ne peut tenir compte ni des exigences étendues du personnel concernant l’organisation de leur activité, ni de leur biographie professionnelle. Ces exigences étendues sont particulièrement bien implantées dans la notion de métier qui, dans les dimensions qu’elle cible, englobe la capacité d’action professionnelle mais aussi la faculté de façonner soi-même sa biographie professionnelle (Kraus, 2024). Les entreprises utilisent elles aussi la notion de métier pour s’orienter, car il s’agit d’une notion très importante en Suisse, tant au niveau structurel que culturel. Les logiques d’action entre les deux, cependant, montrent également des contradictions. Utiliser la notion de métier comme orientation revient à s’orienter sur ces exigences étendues, tout en tenant compte de la faculté de venir à bout de tâches techniques ainsi que de concevoir des situations de travail de manière globale, alors que la perspective entrepreneuriale est plus fortement marquée par des exigences concrètes dans une entreprise dont l’organisation repose sur la division du travail (Harney, 1998).
Un domaine spécial de la formation professionnelle continue en entreprise apparaît dans la relation qu’entretiennent la formation initiale axée sur le travail et la promotion des compétences de base. L’accessibilité des groupes cibles et l’accès effectif à ces personnes représentent un défi majeur pour ce domaine, car il convient de franchir simultanément deux distances d’un point de vue socio-spatial. D’une part, il faut réussir à aborder, au moyen des offres de formation continue classiques, le groupe cible de personnes dont le niveau de formation formel est bas. D’autre part, il faut savoir où trouver les individus regroupés au sein du groupe ciblé par la formation initiale afin de pouvoir les informer sur les offres existantes et les inciter à suivre une formation. La formation initiale axée sur le travail essaie de surmonter ces défis socio-spatiaux en choisissant le lieu de travail comme lieu d’apprentissage des compétences de base. Ici, le but est premièrement d’inclure les contenus du domaine d’activité jugés intéressants pour le groupe cible et paraissant intéresser davantage que l’acquisition des compétences de base, qui représente un objectif abstrait; et deuxièmement de ne plus avoir à surmonter la distance qu’il y a par rapport au lieu d’apprentissage, et de faire ce faisant disparaître les obstacles existant concernant l’usage des établissements de formation. Pour finir, le fait de passer par les entreprises permet d’entrer en contact avec les groupes cibles que l’on rencontre de plus en plus dans certains domaines d’activité, et que l’on est donc susceptible d’aborder par ce biais. Les prestataires de formation continue travaillent en coopération avec des entreprises, tout en essayant de convaincre les autres entreprises de fournir leurs prestations pédagogiques en coopérant ainsi avec eux (Koller et al., 2021). Car si ces activités de formation en entreprise naissent pour l’essentiel des besoins sociaux et de missions publiques, et non à la suite d’un intérêt provenant au départ des entreprises elles-mêmes, il s’avère que l’acquisition des compétences de base par les travailleuses et travailleurs peut pleinement profiter aux entreprises également.
Les dispositions relatives à la formation professionnelle continue en entreprise suggérées dans cette partie peuvent être présentées systématiquement comme suit en prenant en compte les deux formes «offres organisées»/«Workplace Learning» ainsi que les deux perspectives «entreprise»/«personnel» (fig. 1).

Si elles représentent différentes façons d’accéder à une appréhension de la formation professionnelle continue en entreprise, les deux perspectives «entreprise» et «personnel» sont en réalité imbriquées; elles le sont dans la pratique de la formation professionnelle continue en entreprise de par leur qualité de points de vue de nature organisationnelle et personnelle, tout en renvoyant chacune à l’autre, tel que nous le verrons plus en détail dans les deux prochaines parties ainsi que dans le résumé final.
4 Une perspective organisationnelle de la formation professionnelle continue en entreprise
Les entreprises présentent des différences notables en tant qu’organisations, et se caractérisent aussi par des intérêts divergents qui apparaissent également dans le cadre de la formation en entreprise. La formation professionnelle continue en entreprise, en particulier, est un domaine fortement hétérogène, tant par les thèmes qu’elle aborde que par ses structures et réglementations institutionnelles, ses groupes cibles ou les personnes participant à ses offres. L’entreprise est le point central que toutes les formations professionnelles continues en entreprise ont un commun, car c’est elle qui fournit les activités pédagogiques de la formation, les prend en charge ou en donne l’impulsion (Käpplinger, 2018). On peut définir les entreprises comme des organisations développant des structures internes destinées à réaliser un objectif spécifique et correspondant aux conditions structurelles et culturelles de leur environnement (Kühl, 2002). Définies ainsi, on peut dire que les entreprises ont pour but de fournir des prestations et qu’elles développent les structures internes nécessaires à la réalisation de cet objectif.
Henry Mintzberg, l’un des sociologues des organisations les plus visionnaires de ce champ de recherche, distingue trois domaines concernant les structures internes des entreprises, à savoir le noyau opérationnel formé par la prestation de services, les fonctions de direction stratégiques et opérationnelles, et enfin les fonctions techniques et de soutien. Même si la prestation de services est considérée comme le noyau d’une organisation, dans la mesure où elle correspond en effet à son objectif même, Mintzberg considère qu’elle n’est guère possible sans les deux autres fonctions de l’entreprise. Le chercheur insiste par ailleurs sur le fait que l’ensemble de ce qu’il appelle les principes de base, à savoir l’orientation, l’efficacité, la performance, la concentration, l’innovation, la collaboration et la concurrence, doit être suffisamment pris en considération au sein de l’entreprise (Mintzberg, 1991). À l’intérieur de ce cadre organisationnel, les activités de formation peuvent, d’une part, être placées dans les structures de soutien et, d’autre part, être mises en relation avec les fonctions de base. Il convient ainsi de les associer à la stratégie de l’entreprise et de les orienter fondamentalement sur celle-ci, ou d’en tenir à tout le moins également compte (voir notamment Gerhards et Krause, 2021). Les activités de formation contribuent à l’efficacité ainsi qu’aux performances d’une entreprise, dans la mesure où elles tiennent par exemple compte de ses besoins en qualification (M. Müller et al., 2024). Généralement, les activités de formation en entreprise se concentrent, pour les contenus, sur les domaines que l’entreprise considère comme importants, sachant que ceux-ci peuvent dépasser les seules considérations techniques au sens strict (Stutz et Erlach, 2018). Les activités de formation s’inscrivent du reste dans un double rapport à l’innovation: d’une part, les entreprises innovantes sont généralement plus actives dans le domaine de la formation continue, d’autre part, la formation continue peut contribuer à implémenter de nouvelles choses au sein de l’entreprise (Billett, 2022). Pour finir, les activités de formation s’insèrent dans le rapport fondamental qu’entretiennent les notions de coopération et de concurrence. La formation continue en entreprise, en particulier, doit être considérée comme un domaine politique à part entière au sein duquel se jouent différents intérêts, ceux de l’entreprise et du personnel, ou bien au sein duquel se négocient les divers intérêts du personnel (Büchter, 2025; Hendrich et Büchter, 1999). Au niveau de la planification de la formation continue, cela se manifeste tout particulièrement lorsque les entreprises planifient leurs activités de formation non seulement en fonction de leurs exigences, stratégies et innovations, mais également en mettant l’accent sur la participation du personnel à ces offres (Allespach, 2025). Le fait que l’un des principaux points de la recherche sur la formation en entreprise porte sur les processus décisionnels effectués en amont ne relève donc pas du hasard (Käpplinger, 2016; C. Müller, 2023). Du point de vue de l’entreprise, la formation continue se justifie notamment si elle tient compte de ses besoins concrets en développement des compétences (Meyer et Haunschild, 2017), si elle est rattachée à des objectifs stratégiques et va par conséquent plus loin que les besoins définis par les spécialistes, et si elle aide à équilibrer les fonctions de base de l’organisation précédemment évoquées.
Pour toutes ces raisons, la formation continue en entreprise est indispensable, du point de vue de l’organisation entrepreneuriale, à la prestation de services. Elle ne porte pas seulement sur les compétences spécialisées requises par l’entreprise, mais elle est généralement associée à des processus de stratégie, de développement, d’innovation et de participation du personnel. La formation continue constitue un domaine politique à part entière au sein de l’entreprise dans lequel se négocient différents intérêts.
5 Un point de vue personnel de l’apprentissage en contexte entrepreneurial
La participation du personnel à la formation professionnelle continue en entreprise et le Workplace Learning s’inscrivent, à l’intérieur d’un processus itératif, dans la continuité d’expériences de formation antérieures qu’ils viennent prolonger (Kraus, 2022). Ils s’insèrent ainsi dans la structure biographique de la formation de la personne employée qui dure tout au long de sa vie: avant de participer à une offre de formation continue ou d’entamer des activités pédagogiques, la personne a rétrospectivement derrière elle un parcours de formation et d’apprentissage qu’elle va poursuivre au moment où elle suivra sa formation. La participation, à ce moment-là, s’inscrit donc dans la situation professionnelle et personnelle de la personne (Kraus et al., soumis). Prospectivement, en revanche, la formation et l’apprentissage renvoient toujours à l’avenir, puisqu’ils s’orientent aussi vers de futurs savoirs et savoir-faire voire, dans le cas de la formation professionnelle continue en entreprise, vers de futures applications concrètes. D’un point de vue subjectif, la formation professionnelle continue en entreprise se justifie donc surtout si elle se rattache à des parcours antérieurs tout en étant en lien avec de futures opportunités et perspectives de développement (Zeuner et al., 2023).
Même quand elles prennent la forme de la formation en entreprise, les activités de formation et d’apprentissage des adultes se rattachent à ce que les personnes ont vécu précédemment. Pour cette raison, elles ne prennent pas seulement en compte certains intérêts ou contenus, et ne se contentent pas non plus de venir élargir ou compléter ces derniers, mais elles se rattachent aux émotions auxquelles sont associées les expériences de formation et d’apprentissage précédentes (Bolder et Hendrich, 2000). D’un point de vue subjectif, les compétences acquises antérieurement jouent également un rôle important dans l’apprentissage à l’âge adulte, en plus des expériences (de formation) antérieures. Grâce à ces compétences, la personne employée peut en effet, indépendamment des besoins de son entreprise, façonner sa biographie de formation par elle-même, reconnaître les opportunités d’apprentissage qui s’offrent à elle, évaluer leur pertinence, prendre des décisions en lien avec sa formation, et organiser ses processus d’apprentissage; soit autant de choses soulignant une fois encore l’importance que revêt la capacité à façonner soi-même sa biographie professionnelle, qui constitue l’un des principaux objectifs de la formation (professionnelle) (Kraus, 2022). L’apprentissage réalisé en contexte entrepreneurial ne porte pas uniquement, en ce qu’il vient prolonger les parcours de formation et d’apprentissage du personnel, sur les savoirs et savoir-faire professionnels et les compétences transversales liées à l’organisation sociale du travail, mais vise également par exemple à développer l’identité de la personne formée en la confrontant à son activité (Fuller et Unwin, 2017).
La perspective personnelle de la formation en entreprise met l’accent sur l’individu, tant dans son évolution biographique que dans le contexte organisationnel dans lequel il s’inscrit. L’accès aux activités de formation en entreprise et son appréhension nécessitent donc impérativement l’existence de facteurs de nature motivationnelle et certaines conditions socio-structurelles (Boeren, 2017), que les entreprises peuvent influencer par une conception plus expansive ou restrictive des processus de travail (Fuller et Unwin, 2004), ainsi que par la mise à disposition de ressources destinées à l’apprentissage en contexte entrepreneurial. En principe, ces facteurs s’intègrent à des décisions générales de l’entreprise concernant la formation (Käpplinger, 2016).
Du point de vue individuel du personnel, les points centraux sont donc, d’une part, les opportunités offertes en matière de formation professionnelle continue en entreprise et en matière d’apprentissage réalisé durant le processus de travail, ainsi que l’accès à ces opportunités et, d’autre part, la prise de conscience de ces opportunités d’apprentissage. Le point de vue personnel concernant l’apprentissage en entreprise ne se limite pas à l’individu, mais oriente aussi le regard vers le contexte organisationnel de l’entreprise dans lequel la personne agit et, sur le plan temporel, vers le développement biographique (de formation) ainsi que la situation de vie de la personne.
6 Résumé: formation continue en entreprise et apprentissage en contexte entrepreneurial
La formation professionnelle continue en entreprise recouvre divers éléments, comme les formations réalisées directement sur site, les mesures mises en place en interne par le département de gestion de la formation, ou encore le Workplace Learning. Du point de vue organisationnel de l’entreprise, ce sont les activités de formation revêtant une importance pour la prestation de services qui prévalent. Ces activités de formation nécessitent de savoir quelles sont les compétences nécessaires au sein de l’entreprise, de se référer à une stratégie, d’innover et de s’impliquer. Du point de vue individuel du personnel, ce sont l’accès aux offres de formation, les opportunités offertes et l’usage de ces offres qui prévalent. Pour ces personnes, l’apprentissage en contexte entrepreneurial dépasse le simple cadre de l’entreprise: il s’inscrit aussi dans leur biographie (de formation), leur situation professionnelle et personnelle du moment, ainsi que leurs projets et perspectives personnels (et de carrière). Considérer la formation professionnelle continue en entreprise sous le seul angle de l’une des deux perspectives présentées dans cet article conduirait à l’appréhender de manière incomplète, car la formation en entreprise et l’apprentissage en contexte entrepreneurial renvoient l’un à l’autre: en contexte entrepreneurial, le personnel ne saurait être indépendant, dans ses activités d’apprentissage, des conditions générales mises en place par son entreprise; quant aux activités de formation en entreprise, elles sont tributaires, pour leur mise en œuvre, des activités d’apprentissage du personnel, lesquelles ne résultent pas seulement de l’affiliation d’une personne à son entreprise, car elles se sont également développées au fil de sa biographie, tout en reflétant sa situation de vie du moment et en entretenant également des liens avec ses perspectives de carrière. Un tel point de vue fournit du reste des pistes concrètes pour la formation professionnelle continue en entreprise, comprise à la fois comme une mission de conception incombant aux entreprises, au personnel et aux prestataires de formation continue, ainsi que pour la recherche dans ce domaine.
Bibliographie
Allespach, M. (2025): Weiterbildungsplanung als Aushandlungsprozess. Dans M. Allespach, B. Käpplinger, & J. Wienberg (Eds.): Handbuch betriebliche Weiterbildung: Kritisch-emanzipatorische Ansätze in Theorie und Praxis (pp. 435–447). Bund Verlag.
Allespach, M., & Buske, R. (2025): Arbeit und Bildung—Theoretische Grundlagen für eine emanzipatorische Weiterbildungspraxis. Dans M. Allespach, B. Käpplinger, & J. Wienberg (Eds.): Handbuch betriebliche Weiterbildung: Kritisch-emanzipatorische Ansätze in Theorie und Praxis (pp. 149–161). Bund Verlag.
Billett, S. (2021): Workplace Learning: Historical Evolution and Socio-Cultural Distinctiveness. Dans S. Dernbach-Stolz, P. Eigenmann, C. Kamm, & S. Kessler: Transformationen von Arbeit, Beruf und Bildung in internationaler Betrachtung. Festschrift für Philipp Gonon. Springer Fachmedien Wiesbaden GmbH.
Billett, S. (2022): The Co-Occurence of Work, Learning, and Innovation: Advancing Workers’ Learning and Work Practices. Dans M. Malloch, L. Cairns, K. Evans, & B. N. O’Connor (HrEdssg.): The SAGE handbook of learning and work. SAGE Publications.
Boeren, E. (2017): Understanding adult lifelong learning participation as a layered problem. Dans Studies in Continuing Education, 39(2), pp. 161–175. https://doi.org/10.1080/0158037X.2017.1310096
Bolder, A., & Hendrich, W. (2000): Fremde Bildungswelten. Alternative Strategien lebenslangen Lernens. Leske u. Budrich.
Büchter, K. (2025): Betriebliche Weiterbildung—Die kurze Phase eines Politikfeldes—Über Politikwidrigkeit und depolitisierende Effekte. Dans M. Allespach, B. Käpplinger, & J. Wienberg (Eds.): Handbuch betriebliche Weiterbildung: Kritisch-emanzipatorische Ansätze in Theorie und Praxis (pp. 117–131). Bund Verlag.
Dehnbostel, P. (2023): Lernorte. Dans R. Arnold, E. Nuissl, & J. Schrader (Eds.): Wörterbuch Erwachsenen- und Weiterbildung (3ème édition, pp. 275–276). Verlag Julius Klinkhardt. https://doi.org/10.35468/wbeb2022-186
Dehnbostel, P. (2024): Neugestaltung der betrieblichen Weiterbildung in der digitalen Transformation. Dans Magazin erwachsenenbildung.at, 51, pp. 63–74. https://doi.org/10.25656/01:30125
Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) (2025, 9 janvier): Entreprises. About Switzerland. Téléchargé le 20 janvier 2025 de https://www.aboutswitzerland.eda.admin.ch/fr/entreprises
Fuller, A., & Unwin, L. (2003): Learning as Apprentices in the Contemporary UK Workplace: Creating and managing expansive and restrictive participation. Dans Journal of Education and Work, 16(4), pp. 407–426. https://doi.org/10.1080/1363908032000093012
Fuller, A., & Unwin, L. (2004): Expansive learning environments. Dans A. Fuller, A. Munro, & H. Rainbird (Eds.): Workplace Learning in Context (0 édition, pp. 1–19). Routledge. https://doi.org/10.4324/9780203571644
Fuller, A., & Unwin, L. (2013): Workplace Learning and Organization. Dans M. S. Malloch, L. Cairns, K. Evans, & B. O’Connor (Eds.), The Sage Handbook of Workplace Learning (1ère édition paperback, pp. 46–59). SAGE.
Fuller, A., & Unwin, L. (2017): Job Crafting and Identity in Low-Grade Work: How Hospital Porters Redefine the Value of their Work and Expertise. Dans Vocations and Learning, 10(3), pp. 307–324. https://doi.org/10.1007/s12186-017-9173-z
Gerhards, C., & Krause, I. (2021): Betriebliche Weiterbildungskulturen in Zeiten der Digitalisierung—Eine Analyse mit Daten des BIBB-Qualifizierungspanels. Dans M. Schemmann (Eds.): Internationales Jahrbuch der Erwachsenenbildung 2021—Optimierung in der Weiterbildung (Vol. 44, pp. 91–115). wbv Media GmbH & Co. KG.
Harney, K. (1998): Handlungslogik betrieblicher Weiterbildung. Hirzel.
Hendrich, W., & Büchter, K. (Eds.). (1999): Politikfeld betriebliche Weiterbildung: Trends, Erfahrungen und Widersprüche in Theorie und Praxis. Rainer Hampp Verlag.
Illeris, K. (2011): The fundamentals of workplace learning: Understanding how people learn in working life (1ère édition). Routledge.
Käpplinger, B. (2016): Betriebliche Weiterbildung aus der Perspektive von Konfigurationstheorien. wbv.
Käpplinger, B. (2018): Theorien und Theoreme der betrieblichen Weiterbildung. Dans R. Tippelt & A. Von Hippel (Eds.): Handbuch Erwachsenenbildung/Weiterbildung (pp. 679–695). Springer Fachmedien Wiesbaden. https://doi.org/10.1007/978-3-531-19979-5_31
Kraus, K. (2022): Die Entwicklung von Beruflichkeit über iterative Lern- und Bildungsprozesse. Dans Zeitschrift für Weiterbildungsforschung, 45(1), pp. 51–67. https://doi.org/10.1007/s40955-022-00208-8
Kraus, K. (2024): Beruf revisited. Zu Krise und Zukunft eines „einheimischen Begriffs“ der Berufs- und Wirtschaftspädagogik. Dans K. Büchter, V. Herkner, K. Kögler, H.-H. Kremer, & U. Weyland (Eds.): 50 Jahre Sektion Berufs- und Wirtschaftspädagogik in der Deutschen Gesellschaft für Erziehungswissenschaft (DGfE) (pp. 273–295). Verlag Barbara Budrich. https://doi.org/10.3224/84742720
Kraus, K., Wenger, N., & Moor, A. (soumis): Aneignung von Lerngelegenheiten. Zur Bedeutung von Lebens- und Erwerbssituationen für erwerbsbezogene Bildungsprozesse.
Kühl, S. (2002): Organisationen. Eine sehr kurze Einführung. VS Verlag für Sozialwissenschaften.
Malloch, M., Cairns, L., Evans, K., & O’Connor, B. N. (Eds.). (2022): The SAGE handbook of learning and work. SAGE Publications.
Marsick, V. J., & Watkins, K. E. (1990): Informal and incidental learning in the workplace. Routledge.
Meyer, R., & Haunschild, A. (2017): Individuelle Kompetenzentwicklung und betriebliche Organisationsentwicklung im Kontext moderner Beruflichkeit–berufspädagogische und arbeitswissenschaftliche Befunde und Herausforderungen. http://www.bwpat.de/ausgabe32/meyer_haunschild_bwpat32.pdf
Mintzberg, H. (1991): The Effective Organization: Forces and Forms. Dans MIT Sloan Management Review, 32(2), p. 54.
Müller, C. (2023): Betriebliche Weiterbildungsentscheidungen im Garbage Can: Typenbildende Rekonstruktion in Klein- und Kleinstunternehmen (Vol. 53). wbv Publikation. https://doi.org/10.3278/9783763974535
Müller, M., Gollob, S., & Hedinger, F. (2024): Importance et mise en oeuvre de la formation continue dans les PME. Fédération suisse pour la formation continue FSEA.
Office fédéral de la statistique (n.d.): Statistique structurelle des entreprises. Téléchargé le 20 janvier 2025 de https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/industrie-services/enquetes/statent.html
Office fédéral de la statistique (2018): Formation en entreprise. Téléchargé le 20 janvier 2025 de www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/education-science/enquetes/sbw.assetdetail.4722823.html
Office fédéral de la statistique (2024a): Structure de l'économie: Entreprises. Téléchargé le 20 janvier 2025 de https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/industrie-services/entreprises-emplois/structure-economie-entreprises.html
Office fédéral de la statistique (2024b): Petites et moyennes entreprises. Téléchargé le 20 janvier 2025 de https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/industrie-services/entreprises-emplois/structure-economie-entreprises/pme.html
Office fédéral de la statistique (2024c): Part des emplois selon la taille des entreprises et le secteur économique. Téléchargé le 20 janvier 2025 de https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/industrie-services/entreprises-emplois/structure-economie-entreprises.assetdetail.32159299.html
Office fédéral de la statistique (2024d): Mircrorecensement formation de base et formation continue 2021: le soutien des employeurs à la formation continue (Actualités OFS 15 Education et science, Numéro OFS 1466–2400).
Stutz, M., & Erlach, E. von (with Schweiz) (2018): La formation professionnelle continue en entreprise en 2015: rapport principal. Office fédéral de la statistique OFS.
Zeuner, C., Pabst, A., & Heilmann, L. (2023): Teilnahme und Nichtteilnahme an Erwachsenenbildung im Lichte subjektiver Begründungen. Ambivalente Befunde einer Hamburger Regionalstudie. In Magazin erwachsenenbildung.at, 50, pp. 31–40. https://doi.org/10.25656/01:28620
Lire l'article en PDF
