22.05.2025
N°1 2025

«Simplement mieux!... au travail»: comment les entreprises soutiennent avec succès le personnel doté de faibles compétences de base

Avec le programme «Simplement mieux!... au travail», la Confédération et les cantons soutiennent les cours dans le domaine des compétences de base pour le personnel peu qualifié. Ces cours axés sur la pratique sont directement organisés dans l’entreprise et concernent les domaines «lecture, écriture, calcul, informatique et langue». Les avantages profitent à la fois aux entreprises et aux adultes concernés. Cet article présente le principe de ce programme de promotion et met en lumière les réussites et les expériences issues de la pratique. Il résume ce qui a déjà été accompli et indique comment les entreprises et les organisations de ce secteur peuvent contribuer à promouvoir les compétences de base sur le lieu de travail. Des exemples concrets montrent comment un cours dans le domaine des compétences de base peut permettre à des personnes motivées d’obtenir, en plusieurs étapes, une certification professionnelle pour adultes.

Télécharger une instruction sur une tablette, comprendre des tâches formulées à l’oral, remplir un rapport sur un support numérique, rédiger un courriel: dans presque tous les emplois, il est indispensable de posséder des compétences de base en lecture, en écriture et en calcul, d’être capable d’utiliser les applications informatiques élémentaires et d’avoir une connaissance suffisante de la langue nationale pour pouvoir exécuter des tâches quotidiennes. Les personnes peu qualifiées et les adultes sans certification professionnelle se heurtent souvent à leurs limites.

En 2022/2023, la Suisse a participé pour la première fois à l’étude internationale PIAAC sur les compétences de base des adultes (OFS 2024). Les résultats le montrent: en Suisse aussi, de nombreux adultes ne disposent que de faibles compétences de base. Environ 22% des personnes en âge d’exercer une activité lucrative (soit environ 1,25 million de personnes) rencontrent des difficultés à comprendre un texte simple. En outre, 19% (1,6 million de personnes) ont des difficultés à effectuer des calculs élémentaires.

Pourtant, disposer d’aptitudes élémentaires en compétences de base est aussi une condition requise à l’apprentissage tout au long de la vie. En d’autres termes, le personnel ne peut se perfectionner que s’il dispose des compétences de base requises. Tel est l’objectif du programme de promotion «Simplement mieux!... au travail». De nombreux adultes ayant de faibles compétences de base occupent un emploi1. Les entreprises sont la porte d’entrée idéale pour ces personnes, un groupe cible qu’il est assez difficile d’attirer vers la formation continue.

Les entreprises ont elles aussi intérêt à investir dans les compétences de base. Si des instructions de travail ne sont pas correctement comprises ou exécutées, il en résulte un préjudice en termes de qualité, des risques pour la sécurité au travail, voire des interruptions de l’exploitation. Les responsables d’équipe doivent consacrer du temps à traduire les ordres de travail. Parfois, ils doivent aussi apporter leur aide pour la saisie de relevés d’horaires ou de commandes sur ordinateur. Si le personnel dispose des compétences de base nécessaires, il est alors plus autonome. Par ailleurs, de nombreuses entreprises sont confrontées à une pénurie de main-d’œuvre. En développant les compétences de base de leur personnel, elles peuvent le préparer à une formation initiale ou continue, et permettre ainsi leur développement professionnel. Cet aspect est particulièrement intéressant pour les entreprises qui investissent déjà activement dans la formation de mise à niveau de leur personnel sans certification professionnelle (Märki 2017).

Promouvoir les compétences de base avec des cours axés sur la pratique

Avec le programme «Simplement mieux!... au travail», la Confédération et les cantons soutiennent les entreprises ou les associations de branches qui renforcent les compétences de base de leur personnel sur le lieu de travail. Cette initiative a été adoptée en 2018 par le Conseil fédéral en tant que mesure pour lutter contre la pénurie de personnel qualifié. La loi fédérale sur la formation continue (LFCo)2 stipule que «la Confédération s’engage, conjointement avec les cantons, pour que les adultes puissent acquérir les compétences de base qui leur font défaut et les maintenir. La Confédération et les cantons associent les organisations du monde du travail à leur démarche» (art. 14 LFCo). La structure du financement repose sur la loi fédérale sur la formation professionnelle3.

L’objectif de la campagne «Simplement mieux!... au travail» est le suivant: dans le cadre d’offres de formation à bas seuil et de courte durée, les collaboratrices et collaborateurs acquièrent les compétences dont ils ont besoin dans des situations de travail concrètes. Étant donné que les contenus sont axés sur la pratique, les participantes et participants peuvent appliquer les acquis de formation directement dans l’entreprise. Cela leur donne confiance et les motive. Il peut s’agir d’une première étape vers un changement de poste ou la prise en charge de nouvelles tâches. Cela peut aussi encourager les personnes concernées à participer à d’autres formations. Avec de meilleures compétences de base, elles sont aussi mieux à même d’assumer certaines tâches de leur vie quotidienne.

Les prestataires de cours soutiennent les entreprises dans toutes les étapes de l’élaboration du cours: analyse des besoins, planification des contenus, organisation du cours, transfert des acquis dans la pratique quotidienne (voir chapitre sur le modèle GO). Les entreprises participent à la définition des contenus; les cours peuvent être organisés à des horaires flexibles et peuvent avoir lieu directement sur place en fonction des besoins des entreprises.

Dès que le concept de cours ainsi que les participantes et participants sont connus, la demande de soutien financier peut être déposée. La subvention est versée à l’entreprise (requérante) après la fin du cours.

Les principaux critères du programme national de promotion sont les suivants4:

  • Les contenus du cours concernent les compétences de base dans les domaines «lecture, écriture, calcul, informatique ou langue».
  •   Le cours est gratuit pour les personnes participantes et il est comptabilisé comme temps de travail.
  • Le cours peut comprendre entre 20 et 40 leçons, avec un maximum de 4 leçons par jour.
  • Pour chaque cours, il faut au minimum 3 et au maximum 12 personnes participantes.
  • Une subvention d’un montant forfaitaire de 3 000 francs est versée pour l’élaboration d’un nouveau cours. À cela s’ajoute le versement d’un forfait de 15 francs par leçon et par personne participante. Un minimum de 80% de temps de présence au cours est exigé.

«Subventionné» ne veut pas dire «gratuit». Les entreprises concluent un contrat avec le prestataire. Le montant du financement dépend de la portée de la mesure de formation. De plus, l’élaboration d’un cours axé sur la pratique requiert un travail de coordination et nécessite le soutien des supérieurs et des responsables d’équipe. Les entreprises financent le temps de travail des personnes participantes. La mise en application des connaissances acquises fait aussi partie des tâches qui incombent aux entreprises.

Le site Internet «Simplement mieux!... au travail» (simplement-mieux.ch/entreprises) est la plateforme de communication du programme. Les entreprises peuvent y trouver des informations pour planifier un cours sur mesure, rechercher un prestataire et soumettre une demande de soutien financier auprès de la Confédération ou des cantons. La rubrique «Stories» contient des vidéos et des témoignages dans lesquels des personnes participantes, des responsables d’équipe ou des membres de la direction expliquent quels sont les effets des cours dans le domaine des compétences de base pour l’entreprise et, sur le plan individuel, pour les collaboratrices et collaborateurs5. Le langage utilisé est adapté aux entreprises. Ainsi, des participantes et participants potentiels ainsi que des entreprises dans des situations similaires peuvent s’inspirer de ces témoignages et se sentir encouragés à organiser leurs propres cours. Sur le site internet du programme, les entreprises peuvent aussi trouver une liste des prestataires. Elles peuvent filtrer ces derniers par région et prendre contact directement avec eux. Le libre choix du prestataire est laissé aux entreprises. Des cours dispensés par des responsables de cours internes à l’entreprise sont également possibles.

Modèle GO pour l’apprentissage individuel sur le lieu de travail

Le modèle GO pour l’apprentissage sur le lieu de travail est le pilier du programme de promotion «Simplement mieux!... au travail». La Fédération suisse pour la formation continue FSEA a élaboré cette méthode axée sur la pratique en collaboration avec des entreprises de différentes branches et de différentes tailles6. Le modèle se compose de cinq étapes concrètes, qui vont de l’analyse des exigences sur le lieu de travail à l’analyse individuelle des besoins de formation d’une personne, jusqu’aux contenus de cours axés sur la pratique et immédiatement applicables au quotidien. Les prestataires de cours aident les entreprises dans la mise en œuvre du modèle. Les entreprises participent à la définition des contenus.

Dans un premier temps, les prestataires de cours s’entretiennent avec les entreprises pour connaître les exigences liées aux postes de travail: quelles sont les compétences de base nécessaires (lecture, écriture, applications informatique, calcul, connaissances linguistiques) dans le cadre d’une situation de travail (analyse des exigences)? Ensuite, les prestataires échangent avec les responsables d’équipe pour déterminer les besoins des personnes employées (inventaire des besoins). Quelles sont les difficultés rencontrées par la personne concernée sur son lieu de travail? Quelles sont les compétences de base concernées? Ces analyses permettent d’élaborer des contenus de cours qui ont un lien concret avec les postes de travail et le besoin des entreprises et qui sont conçus selon les besoins individuels des personnes participantes (mesure de formation).

Le concept est conçu de sorte que les personnes participantes puissent appliquer les acquis directement dans leur quotidien (transfert). Idéalement, une personne responsable du transfert est désignée dans l’entreprise. Souvent, les responsables constatent les progrès d’apprentissage au bout d’une courte durée (évaluation). Si nécessaire, les exercices et les contenus peuvent être précisés et adaptés pendant le cours avec la participation des responsables des cours. Parfois, les recommandations d’adaptation sont formulées par les personnes en formation; pour ce faire, elles tiennent un journal d’apprentissage et rapportent aux responsables des cours les difficultés rencontrées dans leur travail quotidien.

Les cours dans le domaine des compétences de base sur le lieu de travail se distinguent à bien des égards des cours de langue ou d’informatique habituels. À la place de supports didactiques standardisés, on utilise des instructions de travail et des consignes de sécurité propres à l’entreprise, ou des processus et des applications spécialement utilisés dans l’entreprise. Étant donné que les contenus de cours sont basés sur des activités et situations concrètes, l’enseignement est conçu de manière à englober plusieurs compétences. Par exemple, dans une même unité d’enseignement, on pourra combiner le remplissage d’un rapport de travail (compétence utilisée: la langue, avec le vocabulaire, la lecture et l’écriture) et l’utilisation des technologies de communication (télécharger une instruction sur une tablette, remplir un rapport sur une application de smartphone).

Regard sur la pratique

Depuis le lancement du programme début 2018, environ 4 450 collaboratrices et collaborateurs de 315 entreprises ont participé à un cours dans le domaine des compétences de base, avec un temps de présence d’au moins 80%. Parmi l’ensemble des personnes participantes, 1 841 n’avaient aucun diplôme du degré secondaire II. La plupart des demandes provenaient d’entreprises de l’industrie, de l’hôtellerie et restauration, des services divers et du secteur de la santé (voir figure 2; source: SEFRI, état: 18 février 2025).

L’objectif le plus souvent cité pour les cours est l’amélioration des compétences en communication (langue, lecture, écriture). Viennent ensuite les applications informatiques simples et les technologies de l’information (voir figure 3). Le développement des compétences linguistiques est de plus en plus combiné avec l’utilisation des technologies de communication: remplir des rapports sur un support numérique, rédiger des courriels ou des messages sur WhatsApp, télécharger des instructions de travail sur une tablette et être capable de les comprendre. Peu de cours sont consacrés aux mathématiques élémentaires. Pourtant, d’après l’étude PIAAC, il existe un besoin de développement important dans ce domaine.

Les cours dans le domaine des compétences de base sont adaptés à des entreprises de toutes les tailles et de toutes les branches. Nous présentons ci-après quatre exemples caractéristiques issus de l’industrie, de la santé et de la restauration7.

Perlen Packaging AG

La PME basée à Perlen près de Lucerne emploie 200 personnes originaires d’environ 26 pays. Présente au niveau international, Perlen Packaging est une entreprise spécialisée dans la fabrication de films d’emballage pour les médicaments.

Pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, l’entreprise mise sur la qualification de ses collaboratrices et collaborateurs. Elle embauche des personnes motivées, même lorsqu’elles n’ont aucune certification professionnelle adaptée. Condition exigée: elles doivent accepter de suivre la formation de deux ans qui conduit à la certification professionnelle pour adultes – par exemple la formation d’opératrice / opérateur de machines automatisées CFC. Si elles obtiennent la certification professionnelle, les collaboratrices et collaborateurs bénéficient d’un emploi permanent et de perspectives intéressantes si elles doivent changer de poste de travail ultérieurement. Même les personnes qui travaillent depuis longtemps chez Perlen Packaging peuvent suivre une formation de rattrapage en vue d’obtenir la certification professionnelle.

Si les collaboratrices et collaborateurs rencontrent des difficultés sur le plan linguistique, elles participent au cours d’allemand interne à l’entreprise dans le cadre du programme «Simplement mieux!... au travail». Cette initiative pour le développement des compétences linguistiques pendant le temps de travail est l’œuvre du responsable de site Sebastian Schürmann. Au début, le service du personnel doutait que les collaboratrices et collaborateurs aient la volonté d’apprendre. Mais, rapidement, Sebastian Schürmann a pu convaincre plus de personnes que prévu de participer à un cours d’allemand. L’entreprise Perlen Packaging a d’abord testé des cours de langue traditionnels proposés dans la région. Plus tard, l’entreprise a été informée par un prestataire de cours qu’elle pouvait bénéficier de subventions pour des cours dans le domaine des compétences de base dispensés dans les locaux de l’entreprise. Cette solution était idéale: les horaires des cours étaient adaptés à l’organisation de travail par équipes, il n’y avait aucune perte de temps liée aux trajets et les contenus du cours avaient un lien concret avec les besoins de l’entreprise.

Depuis l’automne 2021, 42 collaboratrices et collaborateurs ont suivi le cours d’allemand dispensé en interne chez Perlen Packaging. Pour neuf personnes, ce cours a été la première étape vers la préparation à la formation conduisant à la certification professionnelle pour adultes. Au total, quatre personnes ont obtenu la certification professionnelle depuis l’été 2022, 12 suivent actuellement la formation ou la commenceront durant l’été 2025 (état: mars 2025).

Ceramaret SA

Dans un environnement exigeant et hautement réglementé comme celui de Ceramaret, entreprise spécialisée dans la céramique technique de haute précision dans le canton de Neuchâtel, investir dans les compétences linguistiques de base d’une partie de leur personnel est un choix stratégique et humain. Avec le soutien du programme «Simplement mieux!... au travail», l’entreprise a mis en place des cours de français directement sur le lieu de travail, adaptés aux besoins réels des collaboratrices et collaborateurs. Mieux comprendre les critères techniques, savoir lire un plan, comprendre et appliquer les consignes de sécurité, réussir à exprimer oralement ou par courriel des observations techniques, mieux comprendre ce qui se dit dans les réunions de travail: les bénéfices pour les collaboratrices et collaborateurs sont concrets et multiples. Les responsables d’équipe et RH observent un gain de confiance, une motivation accrue, des personnes plus engagées et alignées avec les exigences de l’entreprise. Ceramaret s’inscrit ainsi dans une démarche de responsabilité sociale, démontrant qu’investir dans les compétences de base, c’est aussi contribuer à l’inclusion et au développement des individus, en favorisant leur employabilité.

XUND, organisation pour les métiers de la santé en Suisse centrale

XUND désigne à la fois l’organisation du monde du travail (OrTra) et le centre de formation dédié aux métiers de la santé pour la Suisse centrale. XUND a pour mission d’assurer la formation initiale et continue des professionnels de santé en fonction de leurs besoins.

De nombreuses possibilités de formation initiale et continue existent pour les métiers de la santé dans le cadre de l’offensive pour la formation. En revanche, des offres de formation à bas seuil pour les personnes avec de faibles compétences de base et travaillant dans des établissements d’accueil et des hôpitaux n’existaient pas encore. Ainsi, jusqu’à présent, de nombreuses personnes actives dans les secteurs du nettoyage, de l’économie domestique, de la restauration, des transports ou des soins étaient éloignées des mesures de formation, malgré leur motivation à participer à une formation continue. Souvent, leurs connaissances linguistiques ne sont pas suffisantes pour participer à des mesures de formation.

XUND a donc élaboré, dans le cadre du programme «Simplement mieux!... au travail», un cours spécifique dans le domaine des compétences de base et l’a testé avec l’établissement pour personnes âgées Viva Luzern Wesemlin. Aujourd’hui, l’utilisation des tablettes, téléphones portables et ordinateurs fait partie des exigences de base dans tous les secteurs. Le cours élaboré par XUND associe donc des compétences du quotidien en communication avec l’utilisation des technologies de l’information (rédiger un courriel, téléphoner, faire un rapport, traiter des commandes sur ordinateur). Des exercices sur la communication dans des situations difficiles font aussi partie du cours. À la fin du cours, les personnes participantes reçoivent des conseils et sont informées des possibilités de formation continue.

Grâce à sa double fonction d’association de branche et de centre de formation, XUND peut désormais proposer ce cours dans tous les établissements de soins de Suisse centrale. Le concept global est prédéfini; les contenus du cours sont adaptés à l’établissement et aux personnes d’après le modèle GO. Les responsables de cours se rendent sur place, font la connaissance des personnes participantes et recueillent des supports de travail. Des cours groupés sont également possibles pour les petites entreprises. XUND se charge d’établir les demandes de subvention pour les entreprises.

Ristorante Pizzeria da Pippo

L’exemple de la pizzeria da Pippo dans le canton de Nidwald montre que les très petites entreprises peuvent, elles aussi, organiser des cours pour leur personnel. Les cours sont subventionnés à partir de trois personnes. Lorsque le Ristorante Pizzeria da Pippo situé à Ennetmoos (NW) a publié une offre d’emploi, beaucoup de personnes ont postulé, mais elles parlaient très peu l’allemand. La directrice Cindy Forestiero a donc décidé d’expérimenter une nouvelle solution. Elle a choisi les personnes chez lesquelles elle a décelé le plus grand potentiel, même si elles ne maîtrisaient pas encore la langue. Condition exigée: elles devaient être disposées à apprendre l’allemand. Mais quels sont les cours vraiment efficaces et comment les organiser en termes d’horaires? L’un des prestataires de formation consultés a attiré l’attention de la directrice sur le fait que son établissement pouvait bénéficier d’un cours subventionné dans le cadre du programme «Tout simplement mieux!… au travail». Cette solution était idéale pour la petite entreprise. L’objectif était que le personnel soit en mesure de tenir une conversation simple avec la clientèle et de téléphoner. Les cinq membres du personnel travaillant en salle et en cuisine ont participé au cours. Pour Cindy Forestiero, le fait que le cours puisse avoir lieu directement dans le restaurant était un grand avantage. Ainsi, les collaboratrices et collaborateurs ne perdaient pas de temps dans les déplacements et pouvaient apprendre tous ensemble, dans un lieu qui leur est familier. Le cours a duré au total 40 heures et avait lieu chaque semaine de 8 heures à 10 heures. Le restaurant ouvre ses portes à 11 heures. Ainsi, le cours s’intégrait bien dans les horaires de travail.

Une difficulté a compliqué le cours, à savoir que les personnes participantes n’avaient pas le même niveau au début de la formation. Une serveuse n’avait presque aucune connaissance en allemand, tandis que d’autres avaient déjà quelques notions de base en compréhension. La formatrice expérimentée a toutefois bien répondu aux attentes et le personnel était très motivé. Certaines personnes répétaient pendant leur travail ce qu’elles avaient appris lors de la formation ou poursuivaient leur apprentissage le soir. Melania de Marco s’est sentie rapidement en confiance pour s’adresser directement à la clientèle en allemand ou prendre les commandes par téléphone. Elle poursuit son apprentissage de manière autonome et apporte parfois des exercices à faire sur le lieu de travail. Lorsqu’elle en a le temps, Cindy Forestiero s’exerce avec elle. «Nous essayons désormais de parler le plus possible en allemand dans le restaurant, déclare Cindy Forestiero. Je recommande vivement ce cours. Il est excellent et vraiment très simple à mettre en place.»

Les compétences de base comme tremplin vers la certification professionnelle

Dans les cours dispensés dans le cadre du programme «Simplement mieux!… au travail», les personnes améliorent leurs connaissances linguistiques ou leurs compétences en informatique. Mais un point est vraiment essentiel: dans ces cours conçus selon les besoins individuels et organisés dans un cadre familier, les adultes découvrent qu’ils sont capables d’apprendre. Ils peuvent surmonter les freins à l’apprentissage intériorisés auparavant, par exemple après des expériences scolaires négatives ou se sentant «trop âgés» pour «apprendre à nouveau». Les formatrices et formateurs dans le domaine des compétences de base ont une grande responsabilité: si les adultes ont une expérience d’apprentissage positive dans un tel environnement, ils seront davantage disposés à suivre une formation conduisant à la certification professionnelle pour adultes et seront davantage motivés par le principe d’apprentissage tout au long de la vie. Les cours peuvent donc servir de tremplin et donner confiance aux personnes concernées. Ainsi, certaines d’entre elles peuvent changer de poste dans l’entreprise et avoir de plus grandes responsabilités.

Pour que les cours dans le domaine des compétences de base aient un effet durable sur le parcours de formation des personnes concernées, il est primordial de présenter les perspectives de développement professionnel qui s’offrent à elles après le cours (voir figure 4). Certaines personnes participantes réussissent, étape après étape, à effectuer la formation conduisant à la certification professionnelle avec certificat fédéral de capacité (CFC) selon l’article 32 de la loi sur la formation professionnelle. De plus en plus d’organisations de branches proposent aussi des certificats de branches comme qualification partielle, ainsi que des cours préparatoires conduisant à une certification professionnelle.

Un bon exemple est l’offre de cours à bas seuil proposée par le centre de formation professionnelle d’Olten, dans le canton de Soleure. Cet établissement propose des cours de rattrapage et des cours préparatoires conduisant à la certification professionnelle, par exemple le CFC d’opératrice ou d’opérateur de machines automatisées (voir exemple pratique «Perlen Packaging AG» ci-dessus). L’école professionnelle propose un cours dans le domaine des compétences de base. Les compétences en lecture, écriture, mathématiques élémentaires et applications informatiques peuvent ensuite être approfondies lors du cours de compétences de base proposé en interne. Les personnes participantes ont ensuite la possibilité de suivre l’enseignement de culture générale pour qu’elles n’aient pas trop de «connaissances scolaires» à assimiler en même temps que leur formation professionnelle. Certes, cela rallonge la durée de la formation, mais les barrières pour pouvoir la suivre efficacement sont moins élevées.

Conclusion: un programme efficace, mais peu connu

Depuis le lancement du programme de promotion en 2018, les cours dans le domaine des compétences de base sur le lieu de travail ainsi que le modèle GO ont fait leurs preuves dans de nombreux cas. Le nombre de demandes de soutien financier pour ce programme augmente constamment, mais lentement. Principale lacune: le programme et l’utilisation des compétences de base sont encore peu connus dans les entreprises. Le potentiel est encore largement sous-utilisé.

Dans les entreprises, le personnel peu qualifié est souvent perçu comme étant peu motivé. Il n’est pas pris en compte dans la stratégie de formation continue, tandis que le personnel qualifié a beaucoup plus de chances de bénéficier de mesures de développement (Gollob et al, 2024). Pourtant, les témoignages des personnes participantes aux cours sur le lieu de travail le montrent: si on propose au personnel peu qualifié des offres pertinentes et adaptées à ses besoins, le nombre de personnes participantes sera nettement supérieur aux prévisions. Les collaboratrices et collaborateurs ressentent le fait que l’on fait quelque chose pour eux. Cette reconnaissance est une immense source de motivation, et cela crée aussi une valeur ajoutée pour l’entreprise.

Souvent, les responsables d’équipe constatent que leur personnel a des lacunes dans les compétences de base, mais ils n’ont pas la solution. Ils recherchent sur internet des prestataires proposant des cours d’allemand ou des cours d’informatique aux entreprises. Souvent, c’est un prestataire privé qui les informe de la possibilité de bénéficier de cours sur mesure et d’un soutien financier.

Les petites entreprises sont encore insuffisamment informées. Cela s’explique par le fait que dans ces entreprises, le temps et l’argent sont un problème fondamental quand il est question de formations continues en entreprise. Pourtant, investir des moyens dans la main-d’œuvre en vaut la peine (Gollob et al, 2024). Une possibilité intéressante existe, à savoir les cours groupés pour petites entreprises. De tels cours peuvent être proposés par des organisations du monde du travail ou des associations de branches pour les entreprises affiliées (voir l’exemple de XUND ci-dessus). Cette option est encore très peu utilisée à ce jour.

Il faut davantage de multiplicateurs qui sont en étroite relation avec les entreprises, dont le rôle est d’informer et de conseiller ces dernières. Au moyen d’exemples concrets, ces multiplicateurs peuvent montrer aux entreprises et à leur branche les avantages qu’elles peuvent tirer du développement des compétences de base. La Confédération et les cantons jouent un rôle important à cet effet. Les associations de branches et les organisations du monde du travail doivent, elles aussi, davantage s’impliquer. Les chambres de commerce, les associations des arts et métiers, les associations industrielles et commerciales peuvent encourager leurs entreprises affiliées à développer les compétences de base de leur personnel. Elles parlent le langage des entreprises. Elles seront donc plus efficaces et plus crédibles que des prestataires privés qui devront convaincre chaque entreprise des avantages que présentent les cours dans le domaine des compétences de base.

L’objectif est de permettre un rapprochement entre les acteurs économiques et les prestataires de formation pour qu’ils exploitent ensemble le potentiel en matière de qualification de la main-d’œuvre et garantissent au personnel d’intéressantes perspectives de développement professionnel et une employabilité durable. Les compétences de base sont indispensables à cet effet.

  1. D’après les données de l’étude PIAAC, 17,8% des personnes actives occupées possèdent de faibles compétences en lecture et 10,7% de faibles compétences dans les trois domaines de compétence mesurés (OFS 2024).
  2. Loi fédérale sur la formation continue (LFCo), disponible sur: https://www.fedlex.admin.ch/eli/cc/2016/132/fr
  3. Loi sur la formation professionnelle (LFPr), disponible sur: https://www.fedlex.admin.ch/eli/cc/2003/674/fr
  4. En plus du programme fédéral, les cantons de Berne et de Bâle-Ville disposent de leurs propres programmes d’encouragement, avec des critères légèrement ajustés. La demande peut être déposée directement auprès du canton.
  5. Voir la rubrique «Stories» sur le site simplement-mieux.ch/entreprises
  6. GO-Toolkit; disponible sur: https://www.stories-travail.simplement-mieux.ch/bonnes-pratiques/modele-go-competences-de-base//
  7. De nombreux autres témoignages sont disponibles sur www.stories-travail.simplement-mieux.ch/

Bibliographie

FSEA Fédération suisse pour la formation continue (Eds.) (2015): GO – Promotion des compétences de base dans le cadre professionnel. Projet national de promotion des compétences de base des adultes 2009 – 2015. Disponible en ligne: https://alice.ch/fr/services/publications-et-produits/publications/

GO-Toolkit: Promotion des compétences de base en situation de travail (Volume 1: Guides; Volume 2: Descripteurs); disponible en ligne: https://www.stories-travail.simplement-mieux.ch/bonnes-pratiques/modele-go-competences-de-base/

Märki, Cäcilia (2017): Betriebe als Chancengeber. Eine qualitative Studie über die Förderung der Nachholbildung in Betrieben (Kurzfassung), Zurich; FSEA; disponible en ligne: https://alice.ch/de/project/chancengeber/

Müller, Marianne; Gollob, Sofie & Hedinger, Franziska (2024): Importance et mise en œuvre de la formation continue dans les PME. Zurich: FSEA; disponible en ligne: https://alice.ch/fr/recherche/activites-de-recherche/sondage-aupres-des-pme/

OFS (2024): Compétences en littératie, numératie et résolution de problèmes des adultes en Suisse. Premiers résultats de l'enquête PIAAC 2022/2023. Disponible en ligne: https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.33346105.html

«Simplement mieux!... au travail»: Plateforme pour la promotion des compétences de base en situation de travail. Disponible en ligne : https://www.simplement-mieux.ch/entreprises/