28.11.2023
N°2 2023

Un partenariat recherche – pratique pour l’éducation numérique

Le projet d’éducation numérique du canton de Vaud (2018-2022), axé sur la formation des enseignant·e·s au nouveau plan d’études romand numérique, illustre l’importance d’un partenariat recherche – pratique. Cet article montre, d’une part, comment chercheur·euse·s et praticien·ne·s ont collaboré à ce projet à grande échelle pour établir un modèle de formation en cascade et, d’autre part, comment celui-ci a permis d’assurer une transition fluide entre formateur·rice·s initiaux·ales et enseignant·e·s formateur·rice·s, notamment grâce à une évaluation approfondie soutenant l’amélioration continue.

Si nous cherchons des exemples de coopération dans le domaine de la formation continue, nous trouvons rapidement des projets dans lesquels des institutions de formation continue collaborent avec des institutions publiques ou des entreprises, éventuellement même avec des startups EdTech. Les coopérations entre les institutions de formation continue et les acteurs de la recherche sont en revanche plus rares. Nous montrons dans cet article que la recherche peut être bénéfique à la mise en œuvre de nouvelles formations et nous proposons aux acteurs de la formation continue de considérer les chercheur·euse·s comme de potentiels partenaires de coopération pour les aider à concevoir, monitorer et documenter leurs projets de formation.

Cette approche s’avère particulièrement intéressante dans le contexte de la transformation numérique et de son impact sur l’éducation. Nous allons donc la présenter à travers le projet de réforme «éducation numérique» (EduNum) dans lequel le Centre Learn de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) s’est impliqué d’août 2018 à décembre 2022. De nombreux défis ont été liés à ce projet, tels que la reconstruction des référentiels de compétences, la création de matériel d’enseignement adapté à chaque degré scolaire, la nécessité de convaincre les différents publics de la pertinence d’une introduction des contenus dès l'entrée à l'école. Enfin, cette réforme mobilise plus de 10 000 enseignant·e·s du canton ainsi qu’environ 300 personnes ressources accompagnant les classes et une équipe d’une trentaine d’enseignant·e·s formateur·rice·s dispensant les formations.

L’approche du partenariat recherche – pratique dans le projet EduNum

Le contexte EduNum

Tous les acteurs du système éducatif, de l’école primaire jusqu’à la formation continue, font face à la numérisation de leur environnement. De nombreux projets et réformes émergent, dans tous les cantons et à tous les niveaux. Dans ce contexte, le Département de la formation du Canton de Vaud a lancé son projet de réforme EduNum en 2017, mettant à contribution trois hautes écoles: la Haute École Pédagogique (HEP) Vaud, l’Université de Lausanne (UNIL) et l’EPFL pour analyser la complexité du sujet (aspects technologiques, pédagogiques, didactiques, sociologiques, etc.). Le matériel pédagogique créé et la formation des enseignant·e·s visaient à former les élèves, citoyen·ne·s numériques de demain, à la maîtrise des trois piliers de l’éducation numérique (science informatique, usages et médias).

EduNum a suivi une approche par pilotage. Concrètement, à partir de l’état de la recherche, la réforme, accompagnée de la recherche empirique, a été formalisée avec 12 établissements pilotes de manière itérative (El-Hamamsy et al., 2021) avant d’être déployée à l’échelle cantonale dans les 71 autres établissements.

En collaboration avec les autres partenaires, le Centre LEARN de l’EPFL a ainsi été chargé d’une partie du projet qui consistait: (1) à développer du matériel d’enseignement, concevoir et animer les formations des enseignant·e·s; (2) à mesurer la qualité et l’efficacité de ces formations pour ajuster le dispositif avant de le généraliser à d’autres établissements scolaires et permettre ainsi le déploiement de la formation continue. Cette approche a été possible grâce à un partenariat recherche – pratique (PRP) permettant l’implication des praticien·ne·s, un facteur de réussite bien documenté dans des projets de réforme d’éducation numérique.

Dès les premières actions du projet, la nécessité d’un partenariat avec la recherche dans différentes sphères du projet s’est montrée indispensable. En effet, dans le cadre du pilotage, il était nécessaire de collaborer avec les expert·e·s en éducation numérique pour créer des contenus de formations pertinents et en adéquation avec les référentiels de compétences connus, de recueillir des preuves étayant les points forts et les points faibles des formations réalisées, mais aussi de réfléchir aux moyens de déployer ces formations auprès des enseignant·e·s. Différents groupes de travail ont été créés pour coordonner les actions de pilotage entre les partenaires de ce PRP.

Co-construire un partenariat recherche-pratique

Un PRP permet d’éviter les incohérences et inadaptations d’une réforme sur le terrain (Coburn et Penuel, 2016). Il est caractérisé par la collaboration durable entre le monde de la recherche et celui de la formation pour réaliser un objectif commun.

Dans le projet EduNum, cet objectif commun était l’intégration de l’éducation numérique à tous les niveaux scolaires. La diversité des acteurs impliqués reflète la complexité typique d’un projet lié à la numérisation: des formateur·rice·s, l’équipe de rédaction des moyens d’enseignement, les enseignant·e·s des établissements pilotes (participant·e·s à la formation continue EduNum) et leurs directions, les personnes ressources (enseignant·e·s avec une décharge pour soutenir leurs collègues dans la mise en œuvre de l’éducation numérique au sein de leurs écoles) et enfin les élèves. Dans cet écosystème complexe, les expert·e·s et les chercheur·euse·s collaborent avec ces différents acteurs afin que les connaissances scientifiques actuelles soient intégrées dans les différentes sphères du projet.

Afin de mettre en œuvre ce partenariat, l’équipe de recherche du Centre Learn s’est organisée autour de différentes thématiques, telles que les formations et leur suivi, le test des perceptions des élèves pour la nouvelle discipline, le rôle et l’évolution du rôle des personnes ressources et des directions, et les tests empiriques des activités proposées. Aussi, la mise en œuvre d’un modèle dit en cascade, développé dans la deuxième partie de cet article, illustre ce processus. Il permet aux chercheur·euse·s de renforcer la pertinence du modèle en se basant à la fois sur la littérature scientifique et sur l’évaluation approfondie de la formation.

Dans le cadre du projet EduNum, les chercheur·euse·s ont bénéficié de conditions temporelles et logistiques qui, malgré certaines contraintes, ont permis de systématiser le modèle de collaboration PRP ainsi éprouvé entre recherche et terrain. Voici les données principales concernant ce modèle:

  • L’agenda des formations: en quatre ans, environ 800 journées de formations ont été proposées aux différents publics (directions, personnes ressources, enseignant·e·s pilotes et non pilotes, enseignant·e·s formateur·rice·s) et mesurées par l’équipe de recherche. Cela a donné un cadrage temporel solide, mais aussi la possibilité d’une adaptation, d’un affinage, d’une réévaluation des questions de recherche au cours des différentes tentatives.
  • Une équipe mixte: le Centre LEARN a l’originalité d’avoir pu associer dans un même service expert·e·s du terrain et chercheur·euse·s. Ils et elles ont bénéficié de la proximité du terrain et de l’accès facilité au public cible de manière continue.
  • Des résultats à communiquer: la phase de pilotage visait à transmettre des recommandations aux différentes instances du projet. Grâce aux mesures systématiques après chaque session de formation, de nombreuses données ont été récoltées, analysées et transmises sous forme de rapports annuels non exhaustifs1. Ces recommandations ont permis de réguler le projet pilote mais aussi d’identifier et d’anticiper les enjeux et les barrières en vue du déploiement, en optimisant ainsi la gestion des ressources investies au niveau du département.
  • Un besoin de passage à l’échelle: la dimension du projet (350 enseignant·e·s à la rentrée 2018 passant à 1 600 à la rentrée 2021 avec la première phase de déploiement) a très vite exigé un passage à l’échelle pour la collecte des données. Des outils basés sur la science des données ont été créés par les chercheur·euse·s pour faciliter la récolte, mais aussi la visualisation des résultats. Ceux-ci ont ensuite donné lieu à la réalisation d’une plateforme web dédiée: The Digital Training Companion2.

La mise en œuvre du partenariat recherche – pratique avec le modèle en cascade

Le déploiement des formations après la phase de pilotage, impliquant l’intégration de 71 établissements supplémentaires, a nécessité la mise en place d’une structuration de la formation permettant un passage à l’échelle. En effet, il n’était plus possible pour les formateur·rice·s impliqué·e·s dans la phase de pilotage de former un si grand nombre d’enseignant·e·s. En se basant sur des expériences de terrain antérieures, les formateur·rice·s initialement impliqué·e·s dans la phase pilote ont proposé la mise en place d’un modèle dans lequel s’organise un passage de relais visant à rendre les enseignant·e·s pleinement partie prenante de leur réforme en devenant enseignant·e·s formateur·rice·s (EFs). Un modèle dit en cascade, soutenu par la littérature scientifique (El-Hamamsy et al., 2023), a été dessiné en collaboration avec l’équipe de recherche dès la fin de la première année, puis étudié pendant de sa mise en œuvre3 (Monnier et al., 2023).

 

Il s’agissait pour les formateur·rice·s et concepteur·rice·s historiques du projet de partager et transmettre leurs expériences, leurs choix et décisions, leurs ressources aux EFs et de les soutenir au plus près durant les phases de formation sur le terrain. Cette méthode a l’avantage de garantir une formation à grande échelle (environ 6 000 enseignant·e·s recevront à terme la formation) dans un délai raisonnable. En outre, de par leur ancrage dans l’enseignement, les EFs ont la possibilité de dispenser une formation au plus proche de la réalité de la classe. En effet, c’est avec leurs élèves que les EFs expérimentent les principes de la réforme, mais c’est en formation qu’ils et elles les transmettent à leur pairs. Comme l’ont montré ensuite les chercheur·euse·s, cette double posture présente de nombreux avantages, mais peut aussi donner lieu à de multiples difficultés et remises en question (Monnier et al., 2023).

Du pilotage au déploiement: la transmission des formations

Les EFs ont été recruté·e·s sur appel. Pour le cycle 1, sur les 70 candidatures reçues, 16 personnes ont été sélectionnées et dispensées de 6 périodes d'enseignement (1 jour par semaine). Au départ, leur formation prévoyait 23 journées de formations à l’EPFL avec l’équipe des formateur·rice·s historiques et 15 journées sur le terrain durant les journées de formations avec leurs pairs.

Le conduite de ces formations étaient relativement complexes pour plusieurs raisons:

  • Les formations exigent une maîtrise des outils numériques, nécessitant la démonstration mais aussi la résolution de problèmes techniques.
  • Les concepts de science informatique délivrés sont nouveaux et donc aucun prérequis n’est exigé.
  • L’éducation numérique est souvent confrontée à des réticences, voire à des refus en raison d’arguments liés à la sobriété numérique, à l’exposition aux écrans, à la surcharge de travail, aux programmes déjà saturés, voire à la confusion entre enseignement et éducation, notamment sur des thématiques étroitement liées aux pratiques familiales.
  • L’obligation pour les enseignant·e·s de suivre les formations peut créer un climat d’hostilité latente.

Bien que la crise du COVID ait modifié le programme initial en réduisant le nombre de sessions dans les établissements, elle a permis un gain de temps apprécié pour l’appropriation des contenus. L’année suivante, les journées sur le terrain sont devenues majoritaires. Les formateur·rice·s historiques ont maintenu des temps de formation liés aux contenus et à l’approfondissement des compétences. Ils ont finalement mis en place un suivi régulier individuel et collectif en parallèle aux journées de formations.

Le monitoring, élément indispensable pour la transition

Pour garantir l’efficacité des formations données par les EFs, il a été essentiel de collecter des données approfondies allant au-delà de la satisfaction post-formation. En effet, la satisfaction post-formation ne préjuge généralement pas de l’application effective des contenus sur le terrain. Il a été montré que 100% de satisfaction se traduit en moyenne par 30% de mise en œuvre concrète des contenus de formation (rapport interne, EPFL). En effet, la transition entre la satisfaction des enseignant·e·s et leurs changements de comportement sur le terrain est modérée par d’autres facteurs, tels que la qualité des conditions organisationnelles (p.ex. matériel adéquat, temps suffisant pour tester les ressources, soutien de personnes ressources dans l’établissement) (Avry et al., 2023). La simple satisfaction post-formation n’était donc pas un indicateur suffisant pour permettre aux EFs d’obtenir toutes les informations dont ils avaient besoin pour améliorer leurs formations.

Les chercheur·euse·s ont alors proposé d’adapter et d’utiliser le modèle de Guskey (Guskey, 2016). Ce modèle à multiples niveaux d’évaluation4 permet de documenter les impacts du développement professionnel des enseignant·e·s en éducation numérique en mettant en lien:

  • les caractéristiques des enseignant·e·s formé·e·s (motivation, attitudes et auto-efficacité face à la technologie)
  • les caractéristiques de la formation proposée par les EFs (environnement et approche pédagogique, performance de l’équipe de formation)
  • les réactions immédiates des enseignant·e·s (intérêt pour les ressources proposées, utilité perçue, facilité d’utilisation, intention de les utiliser)
  • les connaissances et les compétences acquises
  • les conditions organisationnelles permettant la mise en œuvre sur le terrain des ressources proposées en formation (ressources matérielles, temps alloué, soutien des pairs et de la hiérarchie)
  • les changements comportementaux (adoption des contenus et transfert des compétences numériques enseignées)
  • les conditions de pérennisation (efficacité perçue et adéquation avec les pratiques connues, délai entre la formation et la mise en œuvre)
  • les caractéristiques des élèves (âge, degré, utilisation des technologie, stéréotypes, spécialisation)

  • les résultats des apprentissages des élèves (connaissances, compétences et attitudes)

Ce modèle d’évaluation a été systématisé au cours de la première phase de déploiement de mars 2021 à décembre 2022, grâce à la création d’outils informatiques et statistiques de récolte et de visualisation de données permettant le passage à l’échelle. Bien que, dans le cadre du projet EduNum, les mesures concernant les élèves n’aient pas pu être réalisées, les autres indicateurs ont permis aux EFs de mieux comprendre les points forts et les points faibles de leurs formations, et de s’ajuster en conséquence. Les résultats obtenus ont notamment permis:

  • de légitimer leur rôle de formateur·trice de manière tangible au travers des résultats reçus. En effet, les EFs ont obtenus des scores supérieurs à ceux des formateur·trice·s historiques qui n’avaient pas bénéficié d’un monitoring de leur formation.
  • d'ajuster le contenu en fonction des besoins réels exprimés dans les sondages et de plaider pour des améliorations organisationnelles lorsque nécessaire. En effet, les résultats ont pu montrer que seulement 24% des enseignant·e·s rapportaient avoir assez de temps alloué pour essayer les ressources avant de les mettre en œuvre avec leurs élèves (rapport interne, EPFL).

Finalement, ces résultats ont permis de communiquer aux participant·e·s des formations les résultats pertinents: pour montrer les modifications et la prise en compte des retours effectués d’une session à l’autre, ainsi que pour renforcer l’introduction de nouveaux contenus. Cependant, la culture de l’évaluation a aussi quelques écueils auxquels nous avons dû répondre en priorité: la lecture des résultats accessibles quelques minutes après la fin d’une longue journée de formation peut réserver des surprises émotionnelles de taille si les résultats ne correspondent pas au ressenti général, ou si des commentaires négatifs diminuent le sentiment de réussite des formateur·rice·s. L’accompagnement de l’équipe de recherche durant toutes les journées ainsi que leur accessibilité et leur réactivité ont été largement appréciés. Cela renforce la nécessité d’une collaboration recherche – pratique ouverte et de proximité entre terrain et recherche.

L’interaction recherche – terrain pour la réussite du projet

Les interactions ont été nombreuses au cours des différentes phases de transmission sur deux années et le rôle des formateur·rice·s historiques a été déterminant. Au-delà des aspects quantitatifs, les chercheur·euse·s ont aussi recueilli des données qualitatives qui ont permis de pointer des éléments essentiels quant à la réussite d’une transition formateur·rice·s – EFs:

  • transmissions optimales des ressources au cours de sessions de formations hebdomadaires, adaptations et réécritures selon les besoins observés;
  • observations, entretiens personnalisés et accompagnements des sessions de déploiement par les formateur·rice·s;
  • tenue d’un carnet de bord par les EFs la première année pour consigner leurs ressentis, motivations, besoins, expériences;
  • organisations des temps d’échanges et de bilans pour développer les compétences d’analyse des EFs et envisager les différentes options possibles;
  • définition du cadre des ajustements nécessaires dans les formations en fonction des publics et des différentes phases du planning.

À travers des entretiens de groupe et des carnets de bord organisés par les chercheur·euse·s, les nouveaux et nouvelles EFs ont également pu partager leurs perceptions des avantages et des tensions liés à ce nouveau défi professionnel. Ces échanges ont contribué à enrichir la littérature existante sur les différents points à considérer lors de la mise en place d’un modèle en cascade. Ces entretiens montrent que l’organisation joue un rôle crucial, englobant à la fois les aspects liés aux contenus et à la logistique. Dans un domaine aussi innovant et émergent, les contenus doivent être rapidement adaptables pour correspondre à la réalité du terrain, tout en restant conformes aux référentiels de compétences élaborés dans le cadre du projet. En ce qui concerne la logistique, elle doit prendre en considération les besoins en matériel technique pour des groupes de taille raisonnable. En outre, les EFs doivent disposer du temps nécessaire pour tester et s’approprier le matériel et les contenus. Le déploiement des EFs doit être soutenu en amont par la sélection de personnes engagées dans le projet, capables de s’adapter rapidement et bénéficiant d’une expérience sur le terrain. La formation que les EFs reçoivent devrait viser à les rendre compétent·e·s tant sur le plan technique que pédagogique, autonomes dans la gestion de leur formation, et en lien constant avec leurs formateur·ice·s grâce à des feedbacks et/ou des visites (Monnier et al., 2023).

Conclusion

Pour conclure, la co-construction établie lors du projet EduNum entre les différents partenaires a été perçue comme bénéfique par les chercheur·euse·s et les praticien·ne·s. Plus concrètement, les chercheur·euse·s rapportent que la collaboration leur permettait de mieux comprendre l’efficacité du dispositif testé grâce à des retours quantitatifs et qualitatifs. Côté enseignant·e·s, certain·e·s ont changé leur perspective sur la recherche, s’impliquant dans la diffusion directe des résultats ou se portant même volontaires pour d’autres projets avec un PRP (El-Hamamsy et al., 2022). La collaboration était intense, avec des échanges fréquents et réguliers, nécessaires afin qu’un PRP puisse avoir une valeur ajoutée pour les parties prenantes. L’implication des formateur·rice·s historiques dans le suivi et l’analyse des résultats a montré la richesse de la méthode. Plusieurs facteurs y ont contribué et posent les bases utiles pour d’autres projets de formation continue impliquant recherche et pratique.

  • L’intérêt et la connaissance réciproques des objets de la recherche et de l’action sur le terrain: les chercheur·euse·s ont pu se rendre dans les formations pour observer et vivre de manière rapprochée les sessions afin de mieux ressentir puis visualiser les besoins et retours des participant·e·s.
  • Les rôles et responsabilités sont définis, complémentaires et équilibrés: au début du projet et à intervalles réguliers, les partenaires conviennent des tâches et responsabilités en faisant attention à ce que les compétences et expériences de chacun·e soient valorisées, que la complémentarité soit mise à contribution, et que les acteurs de la recherche et de la pratique soient actifs au même niveau.
  • Les partenaires créent une relation basée sur la confiance et la compréhension mutuelle. Au début d’un PRP, il peut être difficile de se comprendre, notamment si les vocabulaires utilisés dans le contexte de la pratique et celui de la recherche ne correspondent pas. Les personnes impliquées dans un PRP doivent avoir le temps et les modalités pour développer un langage commun. Tout au long du projet, mais surtout au début, la confiance des partenaires doit être soignée. Les modalités de collaboration sont à définir pour permettre des échanges réguliers.
  • La mise à disposition d’un outil maniable et lisible pour la collecte et l’analyse des données, via le Digital Training Companion5, permet aux institutions de formation de mettre en place des méthodes d’évaluation efficaces, d’identifier rapidement les domaines nécessitant des améliorations et d’adapter les formations en conséquence. Cette approche optimise l’expérience d’apprentissage et aide les formateur·rice·s à maximiser l’impact de leurs programmes de formation, ouvrant la voie à une évaluation du développement professionnel plus efficace et éclairée.
  • Les activités de recherche sont pertinentes et les résultats sont pris en compte: dans un PRP, les chercheur·euse·s s’investissent dans une recherche qui doit avant tout répondre à des questions ou problématiques concrètes et validées par les praticien·ne·s. Les résultats d’une recherche appliquée doivent aider à guider les pratiques et les décisions.

Le projet EduNum a été pour le Centre LEARN une occasion de mettre en place de manière efficace une collaboration entre recherche et pratique. Les résultats qu’elle a pu valoriser pour le projet et l’adhésion des différentes parties impliquées dans le partenariat à tous les niveaux montrent les bénéfices de ce PRP. Cette rencontre entre recherche et formation promeut à la fois la valeur de la recherche et son adoption par le terrain, ainsi qu’une translation des savoirs réussie pour la formation et les publics engagés.

  1. https://www.epfl.ch/education/educational-initiatives/fr/center-learn/education-numerique-le-projet-edunum/ (consulté le 21.09.2023)
  2. https://www.epfl.ch/education/educational-initiatives/fr/center-learn/education-numerique-le-projet-edunum/la-recherche/modele-devaluation-edunum/le-digital-training-companion/
  3. https://www.epfl.ch/education/educational-initiatives/fr/un-modele-en-cascade/ (consulté le 21.09.2023)
  4. https://go.epfl.ch/evaluation_model_EduNum (consulté le 21.09.2023)
  5. Actuellement en développement, la plateforme Digital Training Companion regroupe et améliore ces outils et vise à aider les institutions de formation, même sans expertise en science des données, à effectuer une évaluation approfondie de leurs formations. Pour cela, la plateforme intègre des référentiels de compétences (DigCompEdu, ESCO) permettant de faciliter la création d’évaluations certifiées. Enfin, elle propose de visualiser en temps réel les données récoltées pour permettre d’identifier rapidement les points forts et les ajustements à réaliser.

Bibliographie

Avry, S., Monnier, E.-C., El-Hamamsy, L., Caneva, C. & Dehler Zufferey, J. (2023):  Monitoring Teacher Training in Digital Education: A Revised Model. [Manuscript submitted for publication]. LEARN, EPFL.

Coburn, C. E. & Penuel, W. R. (2016): Research Practice Partnerships in Education: Outcomes, Dynamics, and Open Questions. Educational Researcher 45, 1 (Jan. 2016), 48-54. https://doi.org/10.3102/0013189X16631750 Publisher: American Educational Research Association.

El-Hamamsy, L., Chessel-Lazzarotto, F., Bruno, B., Roy, D., Mondada, F. (2021): A computer science and robotics integration model for primary school: evaluation of a large-scale in-service K-4 teacher-training program. Education and Information Technologies,  16, 2445–2475. https://doi.org/10.1007/s10639-020-10355-5

El-Hamamsy, L., Bruno, B., Kovacs, H., Chevalier, M., Dehler Zufferey, J. & Mondada, F. (2022): A case for co-construction with teachers in curricular reform: Introducing computer science in primary school. In Proceedings of the 24th Australasian Computing Education Conference (ACE '22). Association for Computing Machinery, New York, NY, USA, 56–65. https://doi.org/10.1145/3511861.3511883

El-Hamamsy, L., Monnier, E.-C., Avry, S., Chessel-Lazzarotto, F., Liégeois, G., Bruno, B., Dehler Zufferey J. & Mondada, F. (2023): An Adapted Cascade Model to Scale Primary School Digital Education Curricular Reforms and Teacher Professional Development Programs. arXiv preprint: 2306.02751.

Guskey, T. R. (2016): Gauge impact with 5 levels of data. SMEC2016 Organising Committee, 6.

Monnier, E.-C., Avry, S., El-Hamamsy, L., Pulfrey, C., Caneva, C., Mondada, F. & Dehler Zufferey, J. (2023): From teacher to teacher-trainer: A qualitative study exploring factors contributing to a successful train-the-trainer digital education program, Social Sciences & Humanities Open, Volume 8, Issue 1. https://doi.org/10.1016/j.ssaho.2023.100518